Felix Vogg, après les Championnats d'Europe à Blenheim, tu as enchaîné et écrit une page d'histoire avec Cartania : victoire dans l'épreuve 5* dans le Maryland. Comment cela s'est-il passé ?
J’ai dû revoir mes plans après ma blessure, car Burghley n'était plus envisageable. Les organisateurs américains m’ont proposé leur soutien, et j’ai décidé que Maryland convenait mieux à Cartania que Pau. Plus le parcours est exigeant et vallonné, mieux elle se sent.
« Au Maryland, tout s'est parfaitement enchainé toute la semaine. »
Je l’avais préparée spécifiquement pour cet événement – un peu comme Colero lors de ma victoire en 5* à Luhmühlen en 2022. Elle était en pleine forme du premier au dernier jour. J’avais le sentiment qu’une victoire était possible si tout s’alignait et si je soignais chaque détail. Le cross difficile et le parcours de saut exigeant lui convenaient à merveille. Même le dressage a été exceptionnel. Tout s’est parfaitement déroulé.
Une semaine plus tard seulement, tu as remporté l'épreuve 4* à Pratoni avec Colero. Qu'est-ce qui te caractérise, toi et tes succès ? Quelle est la recette de ton succès ?
Ma recette est simple : travailler, travailler, travailler. Ne jamais s’arrêter, même quand on est fatigué ou que les choses deviennent compliquées.
Ce ne sont pas les rubans ou les classements qui me motivent, mais le véritable travail de formation du cheval. Je veux réussir à faire émerger un potentiel que d’autres ne perçoivent peut-être pas. Cette année, jusqu’à Avenches fin juillet, je n’avais quasiment aucun grand résultat – parce que j’ai volontairement attendu, avec mes chevaux, que tout soit prêt.
« Le succès ne vient pas du jour au lendemain, il se construit par la persévérance »
Gagner ne doit pas être un hasard, mais le fruit d’un plan. Et si quelque chose ne se passe pas bien au début d’un cross, je préfère ralentir – même si j’étais bien placé après le dressage. Ce qui compte, c’est que le cheval apprenne correctement. Mieux vaut un cheval bien éduqué et en bonne santé qu’une médaille de plus dans l’écurie.
Peu avant les Championnats d'Europe, tu as eu un accident et tu n'as pas pu monter à cheval pendant un certain temps. Que s'est-il passé et comment as-tu réussi à te remettre en forme à temps ?
Je suis tombé fin août à Saulieu, en France. Mon cheval a mal jugé une entrée dans l’eau ; nous avons chuté, et je suis tombé sur l’épaule, directement sur de grosses pierres. Mon bras était ensuite partiellement paralysé – je ne pouvais plus bouger que les doigts. On a d’abord cru à une fracture, mais c’était finalement une forte irritation nerveuse.
« Rendre possible ce qui semblait impossible » – à propos de sa chute
Grâce à une physiothérapie intensive – parfois jusqu’à quatre heures par jour – j’ai pu me rétablir. Les médecins disaient que participer à Burghley ou aux Européens serait impossible, mais je n’ai pas voulu abandonner. J’ai eu la chance d’être entouré d’une équipe médicale exceptionnelle.
Lors des Européens, j’étais remis à environ 70–80 %. Aujourd’hui, je suis presque à 100 %. Il y a encore quelques craquements par moments, mais tout fonctionne à nouveau.
Ta compagne Lea Siegl participe également à des épreuves 5*. Vous semblez vous motiver mutuellement. Comment vis-tu cela ?
Lea a emménagé chez moi, ce qui signifiait pour elle intégrer un nouveau système d’entraînement. Nous avons beaucoup ajusté les choses, et elle applique tout cela avec une grande rigueur. C’est exigeant, mais les résultats parlent d’eux-mêmes : ses performances à Pau, Luhmühlen et aux Européens le montrent.
« Le travail en équipe nous motive tous les deux »
Bien sûr, cela signifie aussi que je me suis parfois davantage concentré sur elle et un peu moins sur mes propres résultats. Mais nous cherchons un équilibre. C’est gratifiant de voir que le système fonctionne pour elle aussi. Et moi aussi, j’en profite : lorsqu’elle monte un de mes chevaux où me donne un retour, cela m’aide à progresser.
La saison est terminée – que font maintenant tes chevaux ? À quoi ressemble l'entraînement hivernal ?
Cartania a été la première à partir en pause ; elle reprend doucement, avec Badminton pour objectif principal. En décembre, le travail de base domine : beaucoup de balades en extérieur, en forêt ou sur la route, très peu de travail en carrière ou en manège. Cela permet d’entretenir muscles, tendons et articulations sans surcharge.
« L’hiver, place au travail de base »
Colero est au repos jusqu’en janvier, car il reprend vite du muscle. Frieda, elle, préfère un entraînement régulier ; une longue pause ne lui réussit pas. Quant aux jeunes chevaux de 7 et 8 ans, ils poursuivent leur progression – chacun à son rythme.
Et toi, prends-tu parfois des vacances ?
J’essaie de partir une fois par an, même si on travaille souvent pendant Noël et Nouvel An. Parfois j’ai un jour de congé par semaine, parfois non. Quand j’ai du temps libre, je m’intéresse à d’autres domaines et continue à me former. Je suis aussi en train de développer une seconde activité, pour l’avenir, la stabilité et une certaine indépendance financière.
« Une fois par an, il faut décrocher – d’une manière ou d’une autre »
Quand commence ta saison 2026 et quels sont tes projets ?
La saison reprendra fin février ou début mars. Avec Cartania, je vise Badminton, puis Burghley. Pour Frieda, la perspective à moyen terme est la Coupe du monde, peut-être un 5* si tout se passe bien. Dao et Colero ont également le potentiel pour un championnat ; Colero continuera tant qu’il s’amuse – à Pratoni, il a montré qu’il prenait encore du plaisir. Le jour où il nous fera comprendre qu’il en a assez, il prendra une retraite bien méritée.
Les jeunes chevaux, eux, auront le temps de se développer pas à pas, selon leurs besoins.
Saison 2026 : « Badminton, Burghley, Championnats du monde – les objectifs sont clairs »
Que souhaites-tu transmettre aux jeunes cavaliers et cavalières de concours complet ?
Travaillez, persévérez, n’abandonnez jamais. Le succès ne vient pas tout seul, et rarement vite. Ce sport est une montagne russe émotionnelle : après chaque bas, il y a un haut.
«Ne jamais abandonner – et rester juste envers le cheval»
Et surtout : rester équitable envers le cheval. Les chevaux ne font rien de travers volontairement. Dans 99 % des cas, c’est le cavalier qui est en cause. Ceux qui comprennent cela progressent vraiment – et dorment mieux la nuit.